Récits de squares
Paul Heintz, Amandine Maas, Keita Mori, Thomas Sindicas
29 septembre - 10 novembre 2018
L’espace public se définit par ceux qui y vivent. Les récits personnels et collectifs fondent les limites et la définition des lieux, paysages urbains. Et les habitants fabriquent l’identité de leur quartier. Dans les parcs, jardins, cours, squares, lieux de passage, d’arrêt, de vie se croisent différentes situations, possibilités de rencontres et d’échanges. L’espace du quotidien s’offre comme territoire d’arpentage, de jeu, de contacts, de relations entre différents éléments. Et au fur et à mesure de leur passage et de leur regard, naissent des interactions entre des habitants ou de simples passants. La présence d’une intervention artistique dans un square public, une rencontre avec une création en cours a donné naissance à une fiction. Cette histoire, celle de ceux qui la vivent, définit la géographie du lieu.
Chaque action artistique a été offerte comme une pose dans les trajets du quotidien, dans le cours de ces espaces, connus, méconnus, découverts, revus. Au hasard d’un dialogue ou d’une pause, les œuvres des artistes ont caractérisé différents espaces de vie et de convivialité. De même que des liens se sont faits et ont engagé la découverte et l’envie de participer à la création d’une utopie urbaine, ces espaces se sont ainsi définis, redéfinis.
La vidéo Ping-pong de Paul Heintz propose un jeu sur le langage. Des enfants s’échangent la phrase « C’est bien » qui devient, au fur et à mesure, un témoignage poétique, une sensation de gravité, l’expression d’une sensation vécue, d’un moment d’arrêt. Les manières de dire, les intonations dans la voix délimitent ici l’espace, le lieu traversé ou habité.
La peinture d’Amandine Maas transporte dans un paysage de rêve, référence aux images des réseaux sociaux : une invitation à se faire prendre en photo et à se voir ailleurs, à voyager. Dans un square et un jardin, Provoquer le geste, ce dispositif de jeu pour se sentir ailleurs, invitait à recréer son espace de projection.
Une carte, projet de Thomas Sindicas, présente la diversité architecturale du quartier de la porte de Montmartre. Les habitants ont pris part à la redécouverte de leur territoire. D’une réflexion sur ses limites et son architecture, ils ont participé à l’écriture de la carte. Des légendes transmettent leurs récits, des mots, leurs visions de leur lieu de vie. Carte libre raconte ce territoire en transformation, véhicule l’esprit de renouveau, d’une utopie d’un nouvel aménagement possible.
Keita Mori, suite à son observation des détails architecturaux d’un square, des sons et de l’ambiance qui y règne a conçu un dessin à partir de fils provenant de vêtements récupérés. Bug report, ici réinstallé, montre un espace labyrinthique : un cheminement de lignes qui conduit à perdre nos repères spatiaux. Cette œuvre, par ses matériaux fragiles, continue à vivre, à se transformer, durant le temps de l’exposition.
Ces quatre projets, ici, montrés, invitent ensemble à repenser notre relation 2018à l’environnement urbain. Chaque situation sur le terrain durant le festival Arts en Espace Public révèle la construction de l’image d’un quartier, entre réalité et fiction, points de vue de l’artiste, récits et actions, créations des habitants. Ils se sont vus acteurs de la définition et de l’identité de leur espace de vie. L’œuvre d’art est sujet de rencontres et son processus est un jeu avec l’environnement et ceux qui y vivent. À l’intérieur, les œuvres transmettent une partie du lieu investi. Elles ont en elles la mémoire des interactions qui sont nées durant les différentes rencontres. Elles révèlent ces quartiers, connus ou en mutation, ces lieux de respiration, de pause et de passage.
Pauline Lisowski
copyright : Michael Silva-Gori
copyright : Michael Silva-Gori
copyright : Michael Silva-Gori